Historique
Les origines
Nous sommes dans la deuxième moitié des années 1970, le secteur social spécialisé du canton de Fribourg commence à se structurer. De caractère caritatif, organisé essentiellement par des institutions d’origine religieuses, la prise en charge du secteur commence à se professionnaliser. Le passage des œuvres caritatives à des prestations spécialisées oblige les acteurs fortement éclatés à se rencontrer, à définir des politiques de prise en charge et à se profiler comme des professionnels du social face à l’Etat payeur. Ce dernier, se déchargeant de ses obligations sur elles, demande aux institutions plus de transparence dans leur gestion et une prise en charge de leurs usagers qui soit mieux ciblée et mieux spécialisée. Les écoles sociales se développent et fournissent des professionnels du social qui, à l’instar des autres branches économiques, s’organisent en syndicats ou en organisations professionnelles.
Dans le canton de Fribourg, les institutions sociales, employeurs, s’organisent autour de l’AFIJIH (Association fribourgeoise des institutions pour les jeunes inadaptés et handicapés) de l’autre côté, les employés-es organisés regroupent leurs syndicats et associations professionnelles en une organisation faîtière dite « commission commune ». Les conditions de travail des institutions sont régies par un « statut cadre » élaboré par les grandes institutions pour leur personnel et qui est utilisé par les autres comme référence. Entre 1977 et 1979, le statut cadre est discuté entre les grandes institutions et le syndicat FChP/CRT (Fédération chrétienne du personnel des services publics / Confédération romande du travail). Il reste toutefois en main des employeurs. C’est les premières formes de partenariat social dans le domaine du secteur social spécialisé.
L’élaboration d’une convention collective de travail
Au début des années 80, le sens du travail social dans une société de consommation avancée est l’objet de larges débats parmi les professionnels. Les écoles sont politisées car les acteurs du social veulent jouer un rôle plus politique sur la scène de la socialisation : la question est de savoir quel sens donné au travail social – faut-il être « policier », « pompier » ou former des individus autonomes qui prennent en main leur vie ? Faut-il être des acteurs du changement social ou des normalisateurs d’une société conservatrice ? Ces débats suscitent des regroupements de professionnels du social qui veulent être reconnus comme partenaires et comme des acteurs collectifs face ou avec les institutions employeurs. A la fin des années 1980, à Fribourg, le Syndicat FChP/CRT appelle des autres employés-e organisés-es et non organisés-es à se coaliser au sein de la « Commission commune des employé-es des institutions membres de l’AFIJIH ». Cette commission commune n’est pas une association légalement constituée, elle est la conjugaison de volontés communes autour d’un projet : Avoir une convention collective de travail en lieu et place du « statut cadre » pour régir les conditions d’embauche et de travail des institutions s’occupant des enfants, jeunes et adultes handicapés et inadaptés.
1984 : première CCT du secteur
De 1980 à 1984, toujours mieux organisées et structurées, la commission commune, groupement collectif et structuré des employé-e-s, d’une part et la commission de négociation de l’AFIJIH, organe de délégation des institutions-employeurs, d’autre part vont de pourparlers en négociations, bon an, mal an, pour enfin signer, en été 1984, la première CCT du secteur social du canton de Fribourg. Il y eut des avancées qualitatives, des ruptures, des manifestations de rue, des conflits ouverts, il a fallu l’intervention de la commission cantonale de conciliation et d’arbitrage pour les conflits collectifs de travail afin de trouver, enfin, un accord qui, il est vrai a nécessité beaucoup de compromis de la part des employé-e-s. A cette époque, l’AFIJIH regroupait une vingtaine d’institutions et la commission commune représentait environ quatre cents salarié-e-s. La CCT fut renouvelée, donc renégociée en 1991 pour tenir la route jusqu’en 2005. C’est la seule CCT qui n’a pas subi de démantèlement entre 1990 et 2001 en Suisse romande.
Aujourd’hui la collaboration et le financement de la gestion de la CCT sont paritaires. INFRI, l’Association fribourgeoise des institutions spécialisées représente une soixantaine d’institutions (Direction). La FOPIS, Fédération des organisations du personnel des institutions sociales fribourgeoises représentent environ 2000 collaborateurs/trices des institutions.